Lors de la dernière audience du procès des événements du 28 septembre, le Ministère public a demandé au tribunal la requalification des chefs d’accusation en crime contre l’humanité. Le président a suspendu l’audience en attendant la réponse du parquet et le temps pour lui de se prononcer. Sans doute, cette demande du parquet est soutenue par les parties civiles.
Les questions que bon nombre de citoyens se posent, qu’est-ce que la requalification des faits et quel est l’interêt de cette requalification pour le Ministère public? Pour y répondre, nous avons joint le Juriste Journaliste.
« Je voudrais d’abord préciser que mon intervention ne s’inscrit nullement dans le sens de me prononcer sur le bien ou mal fondé de la requalification demandée par le parquet ( Je réserve cet exercice au juge). Ma motivation consiste simplement à répondre aux questions énoncées.
En effet, la requafication des faits consiste à donner une nouvelle qualification aux faits poursuivis. Par exemple, au stade actuel, les charges retenues contre les accusés du 28 septembre sont entre autres coups et blessures volontaires, tortures, viol, meurtres, assassinats, complicité de ces infractions etc. La requalification demandée par le parquet consiste à qualifier désormais ces charges en crime contre l’humanité», a expliqué Kalil Camara.
Quant à l’intérêt de la requalification, le juriste répond: « Je pense qu’avant l’intérêt, il est important de faire comprendre ce que c’est que crime contre l’humanité. Cette infraction figure dans le statut de Rome en son article 7 et est prévu à l’article 194 du code pénal guinéen. Les infractions que nous avons relevées dans la première qualification notamment coups et blessures, tortures, meurtres etc, sont crimes contre l’humanité lorsqu’ils sont commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique contre une population civile. Maintenant parlant de l’intérêt, il faut dire qu’en requalifiant les faits en crimes contre l’humanité, la responsabilité pénale s’élargit, les peines s’alourdissent, sans oublier l’imprescriptibilité de l’action publique.
En fait, lorsqu’il s’agit de crimes contre l’humanité, la responsabilité pénale des chefs militaires ou des autorités hiérarchiques peut être engagée par leur simple inaction face aux faits commis. Ils peuvent être tenus responsables des infractions commises par des subordonnés placés sous leur autorité ou leur contrôle s’ils savaient ou auraient dû, en raison des circonstances, que leur subordonnés commettaient ou allaient commettre ces infractions et s’ ils n’ont pas pris toutes les mesures nécessaires raisonnables qu’il était en leur pouvoir de prendre pour en empêcher la commission, ou ils n’ont pas pris les sanctions justifiées par les actes commis ou encore il n’en ont pas référé aux autorités compétentes aux fins d’enquêtes ( article 197 et suivants du code pénal).
Alors que lorsqu’il s’agit de meurtre, assassinats, viols et autres faits qui leur sont reprochés, les accusés ne sont responsables que s’il sont auteurs (eux-mêmes ont commis ces faits ) ou alors complices par des instructions, assistance, aide etc», a précisé le journaliste.
Selon Kalil Camara, la requalification en crime contre l’humanité est un fardeau pour la défense et un ouf de soulagement pour le Ministère public et les parties civiles.
Olladi Ibrahima