Depuis mardi, une vidéo circule sur les réseaux sociaux, montrant un prisonnier de guerre ukrainien se faire décapiter. Elle est toujours en cours d’authentification.
La vidéo dure une minute et quarante secondes et les images sont difficilement soutenables. Sur celles-ci, un homme en camouflage, le visage masqué, tranche le cou d’un autre homme en uniforme se débattant au sol en hurlant « ça fait mal ».
Au bout de quelques secondes, les cris cessent et on entend un homme derrière la caméra incitant en russe le bourreau à « couper la tête » de la victime. Ce dernier finit sa décapitation au couteau, et montre la tête tranchée à la caméra. « Faut la foutre dans le sac et l’envoyer au commandant », dit une voix en russe. À la caméra, on montre également le gilet de la victime barré du trident ukrainien et d’une tête de mort.
• Une vidéo en cours d’authentification
Mercredi, l’Agence France-Presse (AFP) n’était pas en mesure de vérifier dans l’immédiat l’authenticité de la vidéo, ni où et quand elle a pu être filmée. Les autorités ukrainiennes ont indiqué de leur côté chercher à identifier la victime. La vice-ministre de la Défense Ganna Maliar a déclaré sur Telegram que les autorités font « tout [leur] possible pour identifier le défunt ».
Pour sa part, le service ukrainien de sécurité (SBU) a ouvert une enquête sur ce « crime de guerre ». « Nous retrouverons ces monstres […]. Ils seront punis », a martelé le chef du SBU Vassyl Maliouk dans un communiqué.
• Condamnations internationales unanimes
Dans une vidéo publiée sur Instagram, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a jugé que cette vidéo représentait « la Russie comme elle est » et que « le monde doit la voir ». Il a également qualifié les Russes de « monstres » qui « tuent facilement ».
« Ce n’est pas un épisode. Ce n’est pas un accident. C’était (déjà) comme ça à Boutcha. Des milliers de fois », a-t-il poursuivi en référence à la banlieue de Kiev devenue symbole des atrocités attribuées à l’armée russe depuis le début de l’invasion de l’Ukraine en février 2022.
Même son de cloche du côté de la mission de surveillance des droits de l’homme en Ukraine qui s’est dite « horrifiée » et a déploré que ce ne soit « malheureusement pas un incident isolé ». Elle a exigé d’enquêter sur ces affaires et de traduire en justice leurs auteurs. La représentation onusienne a évoqué une seconde vidéo montrant les corps mutilés de prisonniers ukrainiens.
Toujours côté ukrainien, le chef de la diplomatie Dmytro Kouleba a estimé que la Russie était « pire que l’État islamique », organisation djihadiste qui filmait les exécutions de ses otages, notamment par décapitation. « Les terroristes russes doivent être chassés de l’Ukraine et de l’ONU et tenus responsables pour leurs crimes », a-t-il déclaré sur Twitter.
L’Union européenne a déclaré qu’elle demandera des « comptes à tous les auteurs et complices de crimes de guerre » en Ukraine selon une porte-parole du chef de la diplomatie européenne.
• Le Kremlin met en doute la véracité de la vidéo
Côté russe, le porte-parole de la présidence, Dmitri Peskov, a lui aussi qualifié les images d’« horribles », mais s’est interrogé sur leur véracité. « Dans le monde de fakes dans lequel nous vivons, il faut s’assurer de l’authenticité de cette vidéo », a-t-il ajouté. D’ordinaire, les responsables russes se bornent à nier toute implication de soldats russes dans des crimes de guerre, et accusent l’Ukraine d’orchestrer des mises en scène.
La Russie nie en outre, en dépit d’éléments concordants, les exécutions sommaires de civils, en particulier à Boutcha, près de Kiev, il y a un an. Des corps de civils tués avaient été découverts dans la ville. Le 2 avril 2022, des journalistes de l’AFP avaient vu à Boutcha les cadavres de vingt hommes en civil, dont l’un avait les mains liées dans le dos, en plus de carcasses calcinées de véhicules et des maisons détruites.
Ces scènes avaient choqué dans le monde entier, Kiev et les Occidentaux dénonçant à maintes reprises des exécutions sommaires de civils et des crimes de guerre. Moscou a démenti à plusieurs reprises toute implication et évoqué une « mise en scène » de l’Ukraine et de ses alliés.
Depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine en février 2022, Kiev et Moscou s’accusent mutuellement de mauvais traitement de prisonniers constituant des crimes de guerre. Début mars, une vidéo montrant l’exécution présumée d’un prisonnier de guerre ukrainien par des soldats russes a provoqué un choc en Ukraine.
En novembre, le Kremlin s’était lui indigné de deux vidéos semblant montrer l’exécution présumée d’une dizaine de militaires russes par balles après qu’ils s’étaient rendus aux forces ukrainiennes. Fin mars, l’ONU a accusé les forces ukrainiennes et russes d’avoir commis des exécutions sommaires de prisonniers de guerre.
Avec LePoint.fr