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AccueilGUINEETribune : Le dilemme du dirigeant africain (Lamine Bayo)

Tribune : Le dilemme du dirigeant africain (Lamine Bayo)

Les successions de pouvoirs en Afrique, constituent un dilemme qu’on peut assimilé à une situation dans laquelle, deux dirigeants entrant et sortant, qui ont intérêt à coopérer, faute de bonne communication et de d’esprit de consolidation, chacun choisit de combattre l’autre à la faveur des pratiques coloniales et aux frais des innocentes populations. Pour mieux contextualiser cette tristesse, interrogeons-nous  sur certaines réalités de la démocratie importée, au nom de laquelle, les africains s’entre-déchirent si souvent :

  • Dans quel pays occidental, normal actuel, vous avez vu des anciens Présidents ou dirigeants caractéristiques en prison ?
  • Pour l’intérêt de quel pays africain, des occidentaux se sont une fois livrés à des bagarres fratricides ?
  • Qui a jamais vu une grande entreprise africaine déstabiliser un gouvernement européen ?
  • Pourquoi de simples hommes d’affaires européens parviennent-ils, à armer nos nationaux pour écraser des Sociétés nationales et/ou africaines ?
  • Pour quelle raison, en résolution de conflits chez-nous, plutôt que de capitaliser sur les valeurs héritées des ancêtres, nous-nous inscrivons dans des schémas tracés de l’occident ?
  • Dans quel but, nous laissons-nous prendre au perfide piège de la néo-colonisation que nous reconnaissons pourtant distinctement et maudissons en permanence ?
  • Pourquoi les orientations de nos sages, propres de tout zèle ‘’religio-colonialiste’’, pèsent moins que celles des prescripteurs occidentaux ?

On ne finirait d’égrainer ces sortes de situations regrettables dans lesquelles, nous connaissons tous les portes de sortie, mais que nous ne parvenons pas à ouvrir.

A notre sens, dans un conflit endogène, la seule parole de nos sages hors influence coloniale et religieuse excessive, porte plus loin que toutes les déclarations et graves condamnations du style des occidentaux. J’en donne deux simples raisons :

– les graves condamnations et fortes déclarations partent généralement des partisans de chacune des parties en colère et finissent par favoriser la formation de blocs radicalisés, propres à entretenir, voire exacerber, la situation dégradée de départ, provoquant ainsi de fréquents couples manifestations/répressions qui ne guère de nature à améliorer les choses utiles. 

– Par contre, la voie de la médiation portée par la voix des sages d’inspiration africaine, de quelque bord qu’ils soient, vise toujours à neutraliser le conflit tout en améliorant continuellement, la relation entre les parties fâchées, le principe conducteur étant l’entente partagée mais non pas la rude victoire emportée. 

De ce point de vue, je partage nettement la position du Ministre Bah Oury, s’exprimant sur le cas Foniké et Cie, et prônant un dialogue responsable et respectueux de la sécurité et de la quiétude des populations impuissantes, toujours négativement impactées.

Les gouvernants et les gouvernés devront à égale compréhension, se ressaisir et écouter les sages, pour favoriser le franc et constructif dialogue. Gouverner ne veut point dire exercice sans limite du pouvoir et manifester ne signifie guère désobéissance à volonté. 

Alimenter l’histoire dans l’unité, est la meilleure façon d’édifier une nation forte avec moins de rancunes entre nationaux. Nous devons respect et considération à nos sages qui ont l’âge et l’aptitude de comprendre, qui veut aller où et prévenir sur la base des meilleures pratiques morales partagées, les blessures dures à cicatriser. 

Ne jamais perdre de vue que celui qui a intérêt à voir les guinéens se constituer en blocs ennemis, reste le situationniste, le manipulateur colonisateur, agissant depuis le lointain extérieur. Celui-là qui attend tranquillement comme toujours, que nous-nous entre-brûlions à la faveur d’un cadre dit démocratique, qu’il a conçu, introduit et entretenu, afin de toujours tirer son épingle du jeu en jouant au pompier profiteur.

Aux intellectuels guinéens-africains de toute origine, qui tiennent du métier de la noble réflexion, de mettre leur ‘’savoir-écrire’’ en appui au ‘’savoir-dire’’ de nos respectables sages. Les gros mots flatteurs ou détracteurs devront être bannis au risque de générer des blocs haineux et hostiles, à travers lesquels, tous les membres du même camp se prennent pour des bons et ceux d’en face pour des cons. Pourtant, à la consolidation, les perceptions s’ajustent pour laisser place à l’équilibre, à l’harmonie que nos sages savent lire et conseiller pour favoriser la quiétude et le bon vivre que la justice seule, surtout inspirée d’autres cultures, ne pourrait garantir dans nos cités, dans le pays et dans notre Continent.

Me réfèrent à la mésentente qui oppose en ce moment le Mali à la Côte d’Ivoire sur le cas manipulé des « 49 présumés mercenaires », les sages africains pourraient d’un revers de main, balayer ce diffèrent si des pyromanes occidentaux qui attisent le feu, ne s’en mêlaient.

La présente situation qui met les autorités guinéennes actuelles face aux anciens ministres, des hauts cadres de l’Administration, certains leaders politiques, des dirigeants de banques et nombre d’animateurs de la Société civile,  participe de la même logique de recherche de solutions endogènes convenables. Pour le bon aboutissement de cette Transition, qui n’est à vrai dire, pas tâche facile, les autorités ne devront se permettre de perdre l’implication sincère de toute la masse critique de personnes directement et indirectement touchées par les interpellations en cours et à venir.

De quelque nature qu’il soit, un dossier conflictuel confié aux sages qui prônent l’indispensable quiétude de l’heure, trouveraient fort probablement, les convenables solutions à proposer. La condition étant que, leurs appréciations tant qu’elles se révèlent loyales, soient  considérées et les garanties prises par chacune des parties en présence, respectées. C’est idéalement là,  que la justice outillée de moules juridiques à adapter, pourrait se saisir pour critique application,  des solutions proposées par les sages ainsi que des engagements croisés pris par les  parties en brouille.

Ce serait l’une des meilleures pistes d’identification, d’adaptation et de valorisation continue, des meilleures pratiques ancestrales en matière de traitement des conflits. Des pratiques endogènes qui nous ressemblent, qui sont efficaces et qui ont fait leur preuve dans l’harmonisation de la vie des peuples de nos plus grands empires à des époques antérieures à la colonisation et aux religions malicieusement et/ou brutalement imposées à l’Afrique. L’expérimentation d’une telle approche intégrée à nos réalités vivantes, nous réserve des surprises heureuses, empreintes de responsabilité de dignité et de vérité. 

Loin de faire l’apologie de l’impunité, nous sommes tous, gouvernés et gouvernants confondus, le produit d’un cadre qui nous dépasse et qu’il faut rompre afin de mieux nous comprendre, nous respecter et refondre nos intelligences dans la même vision d’une Guinée redessinée. Dans cette dynamique, les premiers résultats comptent pour peu, c’est commencer qui est principal. La fantastique expression « se connaître soi-même » que nous rappelle la charte de la nouvelle Plateforme « YÈRÈLÖN »,  nous invite à nous repositionner sous cet angle critique de recherche et de valorisation de ce que nous avons en partage.

Convaincu qu’aucune initiative de rassemblement n’est à écarter, c’est ici mon intime conviction, ma proposition de solution de sortie du récurrent cercle vicieux, que constitue le dilemme fondamental de succession des dirigeants africains, en commençant d’abord, par la consolidation de tout ce qui klaxonne bon.

Mohamed Lamine BAYO

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