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Sénégal : qui d’Abdoulaye Diouf Sarr ou de Barthélémy Dias prendra Dakar ?

Le premier est ministre de Macky Sall, qui l’a adoubé dans la course pour prendre la capitale. Le second est soutenu par Khalifa Sall, l’ancien maire de Dakar. Tous deux savent qu’ils jouent leur avenir politique dans cette campagne.

Si tout les oppose, les deux concurrents ont néanmoins une chose en commun : pour en arriver là, il leur a fallu se battre. Abdoulaye Diouf Sarr et Barthélémy Dias ont tous deux été officiellement investis début novembre par leurs coalitions respectives pour mener la bataille de Dakar lors du prochain scrutin municipal du 23 janvier, au terme d’une longue, très longue négociation. Et leur tout premier combat s’est déroulé au sein  même de leur propre camp politique.

La lutte pour devenir celui qui dirigera Dakar est à la fois hautement symbolique et politiquement très importante, y compris au plan national. En plus d’être la capitale, et de disposer d’attributions particulières, la métropole est aussi un vivier de voix important. Et si la ville est dirigée par l’opposition depuis des années, la région Dakar a, elle, basculé du côté du pouvoir lors de la dernière présidentielle.

Autant de raisons qui en font un bastion à défendre, ou une terre à conquérir… Outre Abdoulaye Diouf Sarr et Barthélémy Dias, quatre autres candidats se sont officiellement déclarés : la maire sortante, la socialiste Soham el-Wardini, a été investie par l’Union citoyenne/Bunt bi ; l’ancien maire Pape Diop (2002-2009) retente sa chance avec son parti, Bokk giss giss ; le neveu d’Abdoulaye Wade, Doudou Wade, porte les couleurs de sa coalition, Wallu Sénégal ; le ministre d’État Mbaye Niang, enfin, a déposé une liste concurrente à celle de la majorité présidentielle. Quant au magnat des médias Bougane Guèye Dany, qui avait déposé sa propre liste, il est déjà hors jeu, sa candidature ayant été rejetée par la préfecture qui a jugé son dossier « incomplet ».

Mais si Abdoulaye Diouf Sarr et Barthélémy Dias ne sont donc pas les seuls candidats, ils font aujourd’hui figure de favoris, tant l’un et l’autre disposent d’une base solide pour prétendre occuper le fauteuil de maire.

La confiance de Macky

Du côté de la majorité, le ministre de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr, sait pouvoir compter sur le soutien et les importants moyens de Benno bokk yakaar (BBY), la coalition présidentielle, et sur ceux de son propre parti, l’Alliance pour la République (APR), créé par Macky Sall. Déjà maire de la commune de Yoff, dont il est originaire, ce Lébou a en outre reçu le soutien de sa communauté, fondatrice historique de Dakar au XVe siècle et qui n’hésite pas revendiquer le contrôle de la ville.

« Il est le seul à avoir remporté une commune à Dakar lors des dernières élections. Sans lui, ça aurait été zéro pointé pour la coalition ! » rappelle un proche de Macky Sall. Au-delà de cet ancrage local qui a sauvé l’honneur lors de la déroute de 2014, un autre argument a joué en sa faveur : une certaine « légitimité historique » de ce cacique de l’APR qui évoluait auprès de Macky Sall avant l’arrivée de celui-ci au pouvoir. Membre du secrétariat exécutif national et du directoire politique du parti, il est également le coordonnateur du cercle des cadres républicains de l’APR.

Cette confiance accordée par le chef de l’État, Abdoulaye Diouf Sarr sait pourtant qu’elle est à double tranchant

Cet économiste formé en France et en Égypte a exercé plusieurs fonctions dans des organismes publics avant de faire son entrée au gouvernement, en 2014. Ministre du Tourisme, puis de la Gouvernance locale, c’est le portefeuille de la Santé, qu’il se voit confier en 2017, qui va le propulser sur le devant de la scène. La manière dont son ministère a su prendre en charge rapidement les malades et la réorganisation des systèmes de santé conduite sous sa direction ont non seulement renforcé sa notoriété, mais aussi sa popularité.

Abdoulaye Diouf Sarr a donc déjoué les pronostics en parvenant à s’imposer face à Amadou Ba, l’ancien ministre des Affaires étrangères qui était donné favori dans la course à l’investiture pour la mairie de Dakar. Cet « apériste » fidèle qui avait été évincé du gouvernement à la faveur du remaniement de novembre 2020, espérait faire son grand retour sur la scène politique nationale en menant la conquête de la capitale. Mais Macky Sall en a décidément autrement.

Cette confiance accordée par le chef de l’État, Abdoulaye Diouf Sarr sait pourtant qu’elle est à double tranchant. Personne, et surtout pas lui, n’a oublié que sa défaite lors du scrutin de 2014 avait coûté à Aminata Touré sa place de Première ministre.

« Boy Dakar »

Son investiture, le maire de la commune dakaroise de Mermoz-Sacré-Cœur a, lui aussi, dû batailler pour l’arracher. Premier candidat déclaré, dès le mois de mai 2021, Barthélémy Dias a en effet peiné à convaincre Khalifa Sall qu’il était l’homme de la situation. Avant de trancher en sa faveur, l’ancien maire de Dakar a en effet longuement hésité entre lui et Soham el-Wardini, fidèle alliée de Khalifa Sall qui a assuré l’intérim après sa révocation en 2018.

Les rumeurs qui accusaient Soham el-Wardini de fréquenter le pouvoir d’un peu trop près, voire de franchement négocier avec Macky Sall, ont-elles eu raison de sa candidature au sein de la coalition Yewwi askan wi, qui a opté pour son concurrent ? « Certains craignaient qu’elle puisse rejoindre la majorité, c’est vrai. Mais sa loyauté n’a jamais été remise en question : entre elle et Khalifa, c’est à la vie à la mort », estime Djibril Faye, conseiller politique de Barthémy Dias.

Charismatique et énergique, Barthélémy Dias a un côté « grande gueule » qui agace autant qu’il séduit. L’opposant est aussi toujours sous le coup d’une procédure judiciaire pour « coups mortels » dans l’affaire de l’attaque de sa mairie en 2011. Ce jour-là, une fusillade a éclaté, et un jeune homme est mort des suites de ses blessures par balles. Barthélémy Dias, qui fut condamné à deux ans de prison en 2017, a fait appel. Convoqué par la justice le 10 novembre prochain – « cette audience, connue de Barthélemy Dias et de ses conseils depuis le 7 juillet, n’a rien à voir avec sa désignation comme candidat à la ville de Dakar », a précisé le procureur général Lassana Diabé Siby –, il a déjà appelé ses partisans à se mobiliser en sa faveur.

« Quoi qu’on lui reproche, Barth a une stature personnelle indéniable. Or, l’opposition a besoin de visibilité, de quelqu’un qui sait tenir tête au pouvoir, défend Djibril Faye. En arrivant à la mairie, il pourra terminer les projets initiés par Khalifa Sall, affirme son conseiller politique. Il a un projet ambitieux pour la ville et apportera sa touche personnelle. Il représente aussi ce renouvellement générationnel que nous voulons mettre en avant. Et puis, c’est un vrai “boy Dakar” ! »

Quand Jeune Afrique l’avait rencontré à son domicile, en juin dernier, le candidat tout juste déclaré avait longuement développé ses ambitions pour Dakar, dont il voulait faire une « métropole moderne », avec des « rues pavées », où il règnerait plus de sécurité. Il avait promis de « repenser la ville » pour en faire un « hub d’affaires, une porte d’entrée de l’Afrique », avec une administration « plus moderne et informatisée ». « Le pouvoir a combattu Dakar et a privé la ville de tout, dénonçait-il alors, faisant allusion aux difficultés de Khalifa Sall pour mener à bien certains projets lorsqu’il était encore à son poste. S’il était élu, Barthélémy Dias pourrait-il réussir là où son mentor a essuyé des revers ?

Une chose est sûre, dans la guerre de Dakar, la seconde bataille vient à peine de commencer, et elle s’annonce mouvementée.

Avec jeuneafrique

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