spot_img
spot_img
AccueilGUINEEGuinée : Ces profiteurs de régime qui sapent la République de l’intérieur...

Guinée : Ces profiteurs de régime qui sapent la République de l’intérieur (Par Mohamed Chérif Touré)

À chaque régime, les mêmes visages, les mêmes intrigues. Tandis que les peuples espèrent, des individus bien rodés à l’art de la manipulation tirent les ficelles de l’ombre, trompent les dirigeants, et enfoncent la Guinée dans un cycle sans fin de crise politique, de stagnation économique et de fragmentation sociale.
La Guinée regorge de ressources naturelles enviées, d’une jeunesse dynamique et d’un socle culturel d’une richesse inestimable. Pourtant, elle tarde à amorcer une trajectoire stable et durable. Cette contradiction apparente s’explique, en partie, par un phénomène redoutable mais rarement abordé avec franchise : l’existence d’un réseau de profiteurs de régime, des hommes et femmes qui, sous chaque gouvernement, prennent position non pour servir la nation, mais pour se servir d’elle.


Des acteurs bien connus mais rarement inquiétés

Il ne s’agit pas de simples courtisans ou d’opportunistes passagers. Ce sont des figures bien implantées dans les rouages de l’administration, des affaires, voire des milieux religieux ou communautaires, capables de retourner leur veste avec une agilité cynique. Ils survivent à tous les régimes, se présentent comme des conseillers avisés, mais en réalité trompent les dirigeants et court-circuitent la volonté populaire.
Leur méthode est bien rôdée : isoler le chef, lui cacher les vérités du terrain, manipuler les rapports, orienter les nominations vers leurs protégés, détourner les ressources, et créer un rideau de fumée autour des réalités sociales. Le pouvoir se retrouve ainsi piégé, et le peuple, trahi.

L’économie prise en otage

Sur le plan économique, leur présence a contribué à façonner un capitalisme de connivence, où la richesse naît de la proximité avec le pouvoir plutôt que du travail, de l’innovation ou de la transparence. Les grands contrats sont souvent attribués selon des critères d’allégeance et non de compétence. Résultat : des projets bâclés, des surfacturations massives, un budget public drainé dans des circuits opaques, et un climat d’affaires délétère qui dissuade les investisseurs sérieux.
Pendant ce temps, les jeunes diplômés chôment, les infrastructures se dégradent, et les inégalités sociales s’élargissent. Les mêmes profiteurs viennent alors se présenter comme les sauveurs du pays qu’ils contribuent à enfoncer.

La division comme arme

Pour mieux asseoir leur influence, ces profiteurs instrumentalisent les clivages ethniques, régionaux ou religieux. Ils attisent les tensions, montent les communautés les unes contre les autres, tout en se présentant comme les « médiateurs » ou les « pacificateurs ». Cette stratégie a un coût énorme : l’unité nationale en prend un coup, la méfiance sociale se renforce, et les débats de fond sont relégués au second plan.
Dans un pays qui aspire à une démocratie apaisée et inclusive, ces manœuvres représentent une trahison des idéaux républicains.

Le silence complice et les responsabilités partagées

Il serait trop simple de tout imputer aux dirigeants ou à leurs entourages. Une part de la société accepte, par résignation ou par intérêt, ce jeu mortifère. Des intellectuels se taisent par confort ou peur, des cadres administratifs ferment les yeux, et des citoyens valident les abus en échange de faveurs personnelles.
Rompre ce cycle suppose une prise de conscience collective, une réhabilitation de la méritocratie, et le renforcement de nos institutions de contrôle. Le pouvoir ne doit plus être une rente distribuée à quelques fidèles, mais une mission sacrée au service de tous.

Pour une rupture salutaire

La Guinée n’est pas condamnée. Elle peut encore se relever, à condition que les dirigeants s’entourent de patriotes sincères, capables de dire la vérité, de proposer des réformes courageuses, et de résister aux manipulations. Cela exige une vision à long terme, une gouvernance éthique, et un profond renouvellement des élites.
La presse, la justice, la société civile et surtout la jeunesse ont ici un rôle déterminant : dénoncer les impostures, refuser les compromissions, et exiger des comptes.

Conclusion

Tant que les profiteurs de régime resteront les interlocuteurs privilégiés du pouvoir, la Guinée tournera en rond. Mais si le pays ose regarder en face ses véritables ennemis, et entreprend une rupture nette avec les pratiques du passé, alors l’espoir d’une Guinée juste, prospère et unie pourra enfin devenir réalité.

Par Mohamed Chérif Touré – Juriste, spécialiste en droit constitutionnel et droits de l’homme
mohamedcheriftoure80@gmail.com

RELATED ARTICLES

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Most Popular

Recent Comments