Changement du lieu de travail du salarié : ce qu’il faut savoir (Juriste Kalil Camara)

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Le code du travail guinéen dispose en règle générale des modifications des conditions de travail et du contrat de travail. Ce texte les qualifie, selon les cas, de modification mineure et de modifications substancielle. Il ne traite pas spécifiquement de la modification du lieu de travail du salarié.
Conformément à l’arrêté 5679 portant forme et modalité du contrat de travail, le lieu d’exécution est un élément essentiel dans le contrat du travail. Sa modification, c’est-à-dire l’affectation géographique, temporaire ou définitive, est substancielle.

Pour imposer la modification du lieu de travail du salarié, certaines exigences découlent de la jurisprudence :

1- L’établissement d’une clause de mobilité

L’employeur ne peut pas unilatéralement changer le lieu de travail du salarié( modification substancielle). Il faut préalablement que l’éventualité de l’affectation du salarié dans une autre zone soit prévue dans le contrat ou dans une convention collective. C’est-à-dire que ce dernier doit avoir accepté à l’avance dans le contrat qu’il pourrait être amené à travailler dans une autre zone( dans ce cas modification mineure).

Ainsi, la modification du lieu de travail ne peut être imposée au salarié que si c’était prévu à l’avance dans le contrat ou dans une convention collective l’informant.

L’existence de la clause de mobilité ne suffit pas, la jurisprudence exige également certaines conditions pour sa validité.

2- La précision et la détermination de la zone d’affection dans la clause

La clause doit être précise et doit définir la zone géographique applicable au salarié. Une clause imprécise ou trop large est nulle.
Ainsi, dans un arrêt du 28 avril 2011, la chambre sociale de la cour de cassation a déclaré nulle, car trop imprécise, une clause qui prévoyait que le salarié s’engage à accepter : «tout changement géographique pour les besoins de l’entreprise.»

Dans le même sens, la Cour a déclaré la nullité d’une clause de mobilité qui stipulait: « le salarié pourrait être amené à assurer ses missions à l’extérieur, que ce soit en France ou hors de France…»

Ces jurisprudences exigent que la clause de mobilité, après avoir prévu l’éventualité d’affectation du salarié, détermine la zone où le salarié pourrait être amené à travailler. Ce, pour éviter que l’employeur n’éttende unilatéralement la portée de la clause et de manière indéterminée.

3- Délai de prévenance

L’employeur est tenu d’observer un délai raisonnable pour l’application de la clause de mobilité. C’est-à-dire qu’il doit donner un délai au salarié pour se préparer à changer de lieu. Ce délai doit tenir compte de la nature des fonctions du salarié, de la distance entre les zones d’affection…

4- L’intérêt légitime de l’entreprise

L’employeur pourrait commettre l’usage abusif de droit si le changement n’est pas justifié par les intérêts légitimes de l’entreprise. La modification du lieu doit pour but de protéger les intérêts de l’entreprise et l’affection du salarié doit être justifiée par cet intérêt.

La jurisprudence ne rejette pas la mobilité comme sanction légitime lorsque le motif est valable.

Le changement du lieu de travail ne doit pas non plus porter atteinte à la vie personnelle et familiale du salarié, à peine de nullité.
La Cour a reconnu cette atteinte, dans un arrêt en 2008, se prononçant sur une clause de mobilité visant une salariée, jeune mère.
En cas de nullité de la clause de mobilité, l’employeur ne peut s’en prévaloir pour changer le lieu de travail du salarié sans l’accord de ce dernier.

Kalil Camara, Juriste

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